Ce blogue se veut être un journal de mes lectures,
afin d’en conserver une trace, ne serait-ce que d’un bref commentaire ou d’une
citation provenant des ouvrages qui me seront passés entre les mains. Mon
souhait le plus cher est d’en conserver un souvenir, quelque chose de tangible
de ces moments privilégiés passés en compagnie d’un auteur de mon choix que
j’aurai sélectionné, afin que je ne les oublie pas, afin que je ne puisse plus
les oublier.
J’espère relire de temps à autre les articles que
j’aurai publiés sur le présent blogue. En parcourant à nouveau ces empreintes,
j’arriverai alors sans doute à me rappeler le contenu de toutes ces pages qui
auront été lues en silence. La plupart du temps, je préfère lire dans mon
confort intérieur à la Colette, mais sans chatte. La plupart du temps, je fuis
délibérément l’environnement des cafés bruyants, très souvent bondés de monde,
où retentissent les rythmes d’une musique imposés, accompagnés des échos de
conversation de citadins montréalais anonymes. Je lis depuis Montréal. Où que
vous soyez, vous ne me verrez probablement peu souvent à l’œuvre, et cela me
convient parfaitement.
À l’aube de la quarantaine, j’ai célébré récemment
mon 39e anniversaire, l’idée de ce blogue littéraire m’a charmée, pour de
multiples raisons. L’une d’entre elles, que j’ai déjà expliquée, étant pour me
créer des souvenirs de lecture. Et d’autres encore : pour me lancer dans
une nouvelle activité, celle d’écrire, de me replonger dans mes lectures
d’université, et aussi, d’en découvrir de nouvelles. J’ai toujours voulu écrire
un blogue en français. Je serai, dans l’espace de quelques articles, votre
critique littéraire, mais en tournant autour du pot, sans jamais au grand
jamais dévoiler le plus important, car c'est le travail du lecteur de le
découvrir. Si je le pourrais, je serais lectrice à plein temps.
Comme ouverture de ce nouveau projet, je voulais
quelque chose qui sorte de l’ordinaire, une œuvre littéraire qui saurait
éveiller mes passions d’antan… C’est ainsi que je me suis souvenue d’une
auteure, probablement publiée chez Gallimard, mais dont j’avais malheureusement
oublié le nom, qui avait témoigné, devant une salle d’étudiants de licence en
lettres modernes de l’Université de Poitiers dont je faisais partie, que la
lecture des œuvres de Colette lui avait sauvé la vie. Ce souvenir est toujours
demeuré vivant dans mon esprit. J’avais été touchée par toute la transparence
de cette auteure, fort probablement française, qui n’avait pas hésité à nous
partager ses secrets d’écrivaine les plus intimes. Je me souviens m’être
demandé ce qui aurait bien pu lui arriver si elle n’avait pas eu comme
réconfort les œuvres de Colette, si Colette n’avait jamais existé. J’avais été
prise d’un certain vertige. Sa sincérité m’avait beaucoup touchée. Dans le
cadre de la licence de lettres modernes, nous avions fort à faire. J’étais parfois
totalement dépassée par toutes les lectures et les cours que nous devions
suivre. De cette auteure, je n’ai retenu que le souvenir de Colette. En tentant
de mener des recherches sur Internet afin de la retrouver, je suis tombée sur
le titre d’un roman de Hervé Guibert, À
l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie. Ce n’est évidemment pas ce que je
recherchais, mais tout de même, cet auteur m’intéresse.
À Poitiers, dans le cadre du cours métiers du livre
de la licence, de ce que je me souviens, nous étions répartis en groupe, un
auteur était affecté à chaque groupe. Nous avions droit à un échange avec
l’auteur en salle de cours. Nous avions des exercices de groupe pour finalement
avoir le plaisir d’interviewer notre écrivain lors d’un évènement qui se tenait
à la Médiathèque de Poitiers. L’auteur de mon groupe était Christian Prigent;
je m’en souviendrai toute ma vie parce que mon cœur battait à tout rompre
lorsque fut mon tour de l’interroger. Je suis revenue à lui que tout récemment,
avec un ouvrage qui m’a complètement déstabilisé, Le professeur.
Du Christian Prigent que j’ai connu il y a presque
déjà deux décennies, j’avais retenu ces petites choses : il avait été
publié chez P.O.L et il était professeur de lycée, quelque part en Bretagne.
Notre titulaire de cours s’étonnait de constater que Prigent soit professeur au
secondaire, et non pas à l’université. Avant même de retrouver Christian
Prigent, je tenais à tout prix retrouver cette auteure qui devait tant à
Colette. Prigent pouvait bien attendre encore un peu pour les retrouvailles. Je
dois avouer que le choix de Colette m’avait étonné, mais en matière de
littérature française, même encore aujourd’hui, après une licence et une
maîtrise de lettres françaises, même après un DEA, je suis très loin de tout
connaître. Et j’adore la littérature française. J’ai un faible pour la période
suivant la Deuxième Guerre mondiale. Alors je respectais ce choix de Colette,
mais sans vraiment le comprendre. C’est donc presque 20 ans suivant l’obtention
de ma licence de lettres modernes que le souvenir de cette auteure m’est
revenu. Dès lors, je me donnai comme mission de la retrouver. De cette femme,
je me souviens de sa venue en salle de cours. Le souvenir est flou, mais je me
souviens d’une femme blonde, mince, pas très grande, avec une prise de parole
très gentille, pas du tout hautaine, malgré qu’elle avait été publiée chez
Gallimard. De ma vie, je n’ai jamais rencontré d’écrivains qui soient
prétentieux, mais une telle race doit probablement exister. Cela me désole,
mais je n’ai pas un souvenir très précis du visage de celle que je tente de
retrouver. Je me rappelle par contre toute sa profondeur, sa sincérité et sa
grande générosité, de nous exposer sans fard les fondations de son œuvre d’écrivain.
C’est comme si nous avions eu un accès illimité à son âme. Je ne sais pas si
mes camarades auront gardé d’elle le même souvenir que moi, mais ce jour-là,
quelque chose de spécial s’est produit, mais je ne l’ai réalisé que bien des
années plus tard. Pour moi, ce fut la découverte de l’écriture plus grande que
nature, plus grande que soi.
Plus tôt cet été, je partis donc à la recherche de
cette auteure française que j’avais eu le bonheur de rencontrer à l’Université
de Poitiers, à l’initiative d’un jeune agréé de lettres françaises. À
l’approche de mes vacances, je me suis arrêtée à la librairie Gallimard, sur le
boulevard Saint-Laurent, à Montréal, ville que j’habite depuis plusieurs années
déjà. Je n’avais avec moi aucun nom, mais cette seule information vitale
concernant l’écrivaine recherchée : Colette lui avait sauvé la vie… Le
libraire prit gentiment mes renseignements et il alla demander conseil à sa
collègue que je ne vis pas, mais qui se trouvait à la cave. Et c’est à ce
moment-là que l’on m’informa que l’auteure que je recherchais pourrait être
Annie Ernaux. Non non, j’étais convaincue qu’il ne s’agissait pas d’Annie
Ernaux. Ernaux à ce visage aux traits forts, et mon auteure à moi n’avait rien
d’aussi défini. Déployant tous les efforts qu’il fallait afin de me satisfaire,
on me revint avec le nom de Dominique Bona. Bona? Peut-être. Mais encore
maintenant, j’essaie de me reconnecter au souvenir de cette femme, et je doute,
encore un peu, qu’il ne s’agisse de Dominique Bona… Je n’en suis pas tout à
fait certaine. Mais vous comprendrez que je devais à tout prix me lancer dans
mon projet de blogue littéraire, et tant pis s’il y avait erreur sur la
personne. Je sortis donc de la librairie Gallimard avec quatre ouvrages :
Mes vies secrètes, de Dominique Bona.
L’usage de la photo, d’Annie Ernaux et Marc Marie.
Bella-Vista, suivi de Trois… Six… Neuf, de Colette.
Et le dernier, mais non le moindre :
La vie devant soi, de Romain Gary.
J’ai terminé la lecture des quatre premiers livres
cités plus haut. J’en suis encore qu’au tout début de La vie devant soi. Je suis tombée sur Romain Gary par hasard, alors
que j’avais déjà choisi 3 œuvres qui totalisaient déjà une coquette somme… À la
librairie Gallimard, les livres de Romain Gary étaient mis bien en évidence,
tout près de la caisse, peut-être dans un effort de favoriser les achats
littéraires compulsifs. Curieuse, je demandai alors, au libraire :
« Qui est Romain Gary? ». Je trouvais le prénom de cet auteur
original. La combinaison de Romain avec Gary avait une résonnance particulière
qui me plaisait. Je suis véritablement titulaire d’une licence, d’une maîtrise
en lettres modernes. Et pourtant, je n’ai jamais, au grand jamais, entendu
parler de Romain Gary. Alors le libraire de Gallimard prit gentiment le temps
de m’éduquer et m’expliqua que Romain Gary était le seul auteur à avoir
remporté deux fois le prix Goncourt. Quel exploit! Mais le prix Goncourt, aussi
populaire soit-il, un auteur ne peut le remporter qu’une seule fois dans sa
vie… Je crois qu’il est sincèrement impossible de connaître tous les auteurs
français, mais je me reprochai de ne pas connaître de Romain Gary. De tous ces
auteurs, un seul avait gagné deux fois le prix Goncourt, et vous vouliez dire
que je ne le connaissais pas? Je me donnai comme devoir de remédier à la
situation au plus vite et j’ajoutai ce fameux La vie devant soi dans mon panier.
Je commençai mes lectures d’été en lisant Mes vies secrètes, de Dominique Bona. Je
lu cet ouvrage assez rapidement, j’étais heureuse de compter parmi ses
lectrices, car à elle seule, Dominique Bona m’ouvrait toute grande la porte à
un monde de la littéraire française, à son monde à elle. Je vous recommande
fortement de la lecture de Mes vies
secrètes, c’est un ouvrage emballant. J’ai découvert une auteure
d’exception. Il me tarde de lire tous ses autres ouvrages. Suivant la lecture
de Mes vies secrètes, j’ai tout de
suite entrepris la lecture de son tout premier roman, publié en 1981, Les heures volées, que j’ai tout
simplement adorées. Ce premier roman de Dominique Bona est disponible à la
Grande Bibliothèque de Montréal. Une autre raison pour laquelle je me suis
attachée à Bona, c’est qu’elle a écrit la biographie de cet écrivain que je ne
connais pas, Romain Gary. Dominique Bona a aussi écrit plusieurs autres
biographies, dont celle de Colette. Par effet d’enchaînement, j’ai donc
commencé à lire Romain Gary. Assez vite, j’ai voulu savoir si Gary était
toujours en vie... C’est alors que je fis la triste découverte : Romain
Gary s’est suicidé. Heureusement que le libraire de Gallimard c’était tu à ce
sujet, sinon, j’aurai probablement fui ses romans comme la peste, peur d’être
contaminée dans les abîmes d’un gouffre sombre. Or, je ne regrette pas d’avoir
fait la découverte de Romain Gary.
J’ai entrepris la lecture de La vie devant soi, et il ne s’agit pas de l’œuvre d’un homme ayant
pu songer au suicide, mais d’une œuvre très lumineuse. Les premières pages de La vie devant soi sont pleines de vie.
De manière générale, j’achète peu de romans, mais si je pouvais me le
permettre, j’en achèterai davantage. Entre le choix d’encourager un écrivain
vivant ou suicidé, je préfère de loin encourager la production littéraire d’une
personne qui est toujours de ce monde. Or, Romain Gary est vraiment un auteur d’exception.
Il serait vraiment idiot de ne pas le lire sous prétexte qu’il s’est enlevé la
vie. C’est quelque chose qui est très triste parce qu’au fil des pages, j’ai
l’impression de découvrir un grand homme. Il me tarde de me plonger davantage
dans son univers. Et j’ai aussi très hâte d’entreprendre la lecture de sa
biographie écrite par Dominique Bona.
Je vous dis alors à très bientôt.
Je vous dis alors à très bientôt.
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